Podcast en formation ou vidéo : variez les formats selon vos objectifs pédagogiques

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Lorsque Ben Hammersley contracte les termes iPod et broadcasting dans un article du Guardian en 2004, le journaliste ignore que le podcast [1] sera bientôt le mode de diffusion privilégié des contenus audio, généralistes ou professionnels. Quels sont les apports du podcast en formation ? Faut-il l’associer à la vidéo ou bien substituer l’un à l’autre ? Réponses au micro (rédactionnel) de docendi.

Tout le monde connaît le podcast ; quid du podcast en formation ?

Une petite vérification pour commencer : vous qui êtes « fluent in podcast », vous savez tous ce qu’est un podcast natif n’est-ce pas ? Pas si sûr ? Récapitulons. Il existe deux types de podcasts, les replays d’émissions de radio et les podcasts natifs, conçus directement pour une diffusion web ou mobile. À l’instar des autres productions web, ils se caractérisent par leur souplesse de ton, de durée et de ligne éditoriale ; libre à vous de définir ces paramètres comme vous l’entendez ! Une souplesse que l’on retrouve dans le mode d’écoute de ces créations web sonores, dans un lieu fixe (bureau, domicile) ou à l’extérieur, dans les transports par exemple. Malgré ces atouts indéniables, le podcast en formation est loin d’avoir connu un succès fulgurant. « Lors de son apparition dans les années 2000, le monde du Digital Learning prête peu d’attention à ce média aveugle car sans images, reconnaît Nicolas Lozancic, Sparks Product Manager chez Speedernet [2]. Sans doute est-il alors trop associé à la radiophonie et à des démarches de communication, si l’on pense aux radios d’entreprises. » Porté par le succès massif des podcasts grand public, il doit son retour en grâce – en formation – à son faible prix de revient. Dans le contexte actuel, il s’agit d’un argument majeur pour les DRH et les organismes de formation.

Utilisez le podcast en formation pour partager des contenus accessibles partout, à tout moment, dans le registre de l’intime

Pédagogie, vous avez dit pédagogie ? Les apports les plus puissants du podcast en formation relèvent de cette dimension. « Parlez d’immersion et l’on vous citera spontanément la réalité virtuelle ou augmentée (VR/VA). Or le podcast est l’un des médias les plus immersifs ! » Vecteur de l’intime par excellence, le podcast se connecte directement aux capacités émotionnelles et cognitives de l’apprenant. Ne dit-on pas de la voix qu’elle est « le souffle de l’âme » ? En nous isolant du monde extérieur par le canal auditif, le podcast nous permet de nous montrer attentifs à ce que nous entendons, favorisant la mémorisation des mots clés d’un contenu de formation. Il peut même s’écouter (et se réécouter) en faisant autre chose ! « N’hésitez pas à faire vos 15 minutes de podcasting en arrivant au bureau le matin, tout en triant vos mails. » Il s’agira alors d’imprégnation. Autre avantage décisif du podcast en formation, la sincérité et l’engagement qu’il favorise, notamment au regard du format vidéo. « Lorsque nous sommes filmés, nous endossons un rôle. Difficile de faire abstraction du regard qui sera porté sur nous. » À l’inverse, derrière un micro, les intervenants oublient leur posture, se concentrant sur leurs propos. Leur voix traduit alors leur personnalité profonde ainsi que leurs convictions. Le podcast en formation permet de proposer des contenus plus humains, dans un contexte de digitalisation généralisée des dispositifs. Son accessibilité quel que soit le lieu où l’on se trouve, au moment de son choix, en fait également un atout clé en termes d’ancrage mémoriel. Consultez-le plusieurs fois, par espacement croissant (J0, J1, J3, J7, J15) afin de renforcer la trace mémorielle produite par ce contenu. In fine, le podcast contribue à redéfinir les modes d’apprentissage. « Il s’agit de changer de lecture des différentes ressources mises à disposition, explique Nicolas Lozancic. On contrôle moins chaque « pas » de l’apprenant dans son parcours mais on l’invite à explorer toute la richesse des contenus par des changements de ton, de hauteur de voix. » Dans les mois ou années à venir, l’apprentissage se fera de plus en plus entre pairs, de façon collaborative et souvent informelle. La récente réforme de la formation professionnelle promeut ce changement de paradigme avec des actions de formation au périmètre élargi qui incluent notamment la Formation En Situation de Travail (FEST).  

Comment intégrer des podcasts à vos dispositifs de formation ?

Vos objectifs pédagogiques sont à ce stade décisifs. Que visez-vous en recourant au podcast en formation ? Anticipez-vous un usage de ces créations sonores durant le temps de formation ou hors temps de formation également ? Vous allez notamment jouer sur la durée du podcast – d’1min30 à 2min30 pour explorer une question, un concept, de façon synthétique, à des épisodes de 20 à 30 minutes pour des sujets de fond ! « Ce média permet de s’affranchir de l’injonction de brièveté qui gouverne le Digital Learning, souligne Nicolas Lozancic ». Il peut gagner à être très storytellé pour favoriser l’immersion, via un enregistrement en son binaural (= la 3D du canal auditif) – comme le propose la série-fiction L’Appel des abysses. Avec le podcast en formation, vous allez impliquer les apprenants dans la production elle-même afin d’alimenter, au moins en partie, les dispositifs d’apprentissage. Quelques règles simples de prise de son suffisent à produire un résultat de qualité, du point de vue technique :
  • Choix d’un environnement calme et test d’enregistrement (faire attention à l’écho notamment) ;
  • Utilisation de bonnettes [3]pour atténuer les bruits extérieurs ;
  • Prise en main ferme de l’enregistreur numérique ou du smartphone (ou recours à un pied pour une stabilité maximale) ;
  • Écoute au casque pour s’assurer du bon volume sonore.
Notez qu’on retrouve le même type de démarche en formation initiale, au sein de l’Université Catholique de Louvain notamment (UCL, Belgique). Le podcast alimente les différentes phases du parcours pédagogique conçu selon le modèle IMAIP [4] du Pr Marcel Lebrun, notamment le P de Productions.
Source : Intégrer des podcasts dans les dispositifs de formation de Sylviane Bachy (Université Libre de Bruxelles, ex-professeur à l’UCL)
  Quelques exemples : une introduction au cours est transmise aux étudiants par le biais de podcasts (avec un message de bienvenue – motivation) ; ils reçoivent des informations à distance (brève présentation des concepts) ; une ressource « just in time » est partagée (débat, analyse liée à l’actualité – activité) ; ils réalisent eux-mêmes un podcast dans le cadre d’un travail de groupe final, ce qui permet de mesurer l’apprentissage effectué. Le podcast peut aussi intervenir dans la phase d’interaction, en accompagnement collectif d’une activité avant/après.  

La question qui fâche : le video learning est-il déjà obsolète ?

Absolument pas ! Selon Nicolas Lozancic, « les demandes d’accompagnement pour produire des contenus de vidéo mobile se multiplient au sein des entreprises. Il s’agit d’apprendre les fondements de la grammaire audiovisuelle afin d’être capable de faire parler les images ». Rappelons qu’en 2018, YouTube arrivait en tête des outils les plus utilisés dans le monde dans le cadre de l’apprenance ! Les apports du Video Learning sont multiples, tous formats confondus [5] :
  • Recours à deux de nos sens les plus performants, la vue et l’ouïe ;
  • Possibilité de faire passer un message de façon synthétique ;
  • Renforcement de l’engagement et de la mémorisation, grâce au storytelling, en montrant des personnes à l’écran, en suscitant des émotions et grâce au mode de consultation de la vidéo, partout et aussi souvent qu’on le souhaite.
Le développement du Video Learning répond à la même logique qui préside aujourd’hui à celui du podcast en formation : une « entrée » dans le monde de la formation par le biais des usages personnels des apprenants ; une facilitation d’accès et de production des ressources via le smartphone (vidéo mobile) ; des partages spontanés entre collaborateurs, voire une participation des uns aux initiatives des autres. Quel que soit le vecteur utilisé, la qualité de l’ingénierie pédagogique mise en œuvre est décisive pour bien voire mieux apprendre. Podcast, vidéo, réalité virtuelle ou augmentée, enrichissent de façon complémentaire le parcours d’apprentissage proposé.   Le podcast est-il l’avenir de la formation ? En toute hypothèse, il y contribuera. À condition de l’intégrer dans vos dispositifs en exploitant pleinement sa plus-value pédagogique, ce qui suppose d’avoir bien identifié vos objectifs et d’attribuer à certaines de vos ressources une ambition d’imprégnation plutôt que de viser la rétention exhaustive d’informations. Vos podcasts en formation alimenteront ainsi des dispositifs intelligents, de plus en plus co-construits avec les apprenants. Top jingle ! REC.    
[1] Initialement, le podcast se décline aussi bien en vidéo qu’en format audio. Passé dans le langage courant, le terme désigne désormais, presque exclusivement, la diffusion de contenus audio.
[2] Nicolas Lozancic pilote le développement de la plateforme de gestion des apprentissages collaboratifs et informels Sparks, qui sera lancée en septembre 2019. Il propose en parallèle une série de podcasts intitulée Ça reste entre nous, qui décrypte les tendances du Digital Learning (dernier épisode en date : L’apprenant, un client comme un autre ?). Sa série de vidéo mobile sur LinkedIn vise quant à elle à mieux appréhender la réalisation de vidéos (notamment pédagogiques) avec un smartphone.
[3] Bonnette : mousse de protection autour de la tête d’un micro.
[4]  Le modèle IMAIP du professeur Marcel Lebrun redéfinit les 5 facettes de l’apprentissage.
[5] Quelques formats vidéo en formation : vidéo images (interview d’expert, saynète, vidéo explicative), vidéo dessinée, motion design.
tealium