L’AFEST : comment apprendre et mobiliser de nouvelles compétences en situation de travail

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Si l’AFEST [1] bénéficie d’un cadre juridique et réglementaire depuis la loi du 5 septembre 2018 – le décret n°1341 en ayant précisé les contours -, l’approche qui la sous-tend s’inscrit dans le sillage du compagnonnage. Dès lors, en quoi la formation en situation de travail peut-elle se révéler novatrice ? Sur quels principes repose-t-elle et comment maximiser l’efficacité de sa mise en œuvre, dans une optique de développement durable des compétences des collaborateurs et, ce faisant, des organisations ? Décryptage.

Avec l’AFEST, de quoi parle-t-on précisément ?

Désormais formellement inscrite dans le champ de l’action de formation (à l’instar de la FOAD – Formation Ouverte À Distance), l’AFEST en épouse la définition, constituant « un parcours pédagogique permettant d’atteindre un objectif professionnel » (art. L6313-2, loi du 5 septembre 2018). La construction et l’articulation de l’AFEST répondent à des exigences très précises, comme le stipule le décret n°1341, avec : 1) « L’analyse de l’activité de travail pour, le cas échéant, l’adapter à des fins pédagogiques ; 2) La désignation préalable d’un formateur pouvant exercer une fonction tutorale ; 3) La mise en place de phases réflexives, distinctes des mises en situation de travail et destinées à utiliser à des fins pédagogiques les enseignements tirés de la situation de travail (…) 4) Des évaluations spécifiques des acquis de la formation qui jalonnent ou concluent l’action ». Concrètement, comme l’exprime le consultant-formateur CSP Docendi Yann Coirault [2], l’AFEST consiste « à placer des collaborateurs dans des situations apprenantes, moyennant un parcours d’actions de formation en situation de travail, construites de manière individuelle en fonction du « niveau » des apprenants dans les compétences visées ». Ce parcours est créé sur la base d’un référentiel de situations emblématiques. « Pour un cuisinier, il existe trois situations emblématiques : savoir émincer une échalote, faire une omelette roulée et préparer une pâte feuilletée. » Autre exemple : un manager doit être capable de mener une réunion, réaliser un entretien annuel, opérer le recadrage d’un collaborateur, donner du sens à une décision, fédérer son équipe, reconnaître l’engagement de chacun. Ces situations emblématiques sont au nombre de 5 ou 6 maximum quel que soit le poste considéré. L’une des pièces clés du dispositif de formation en situation de travail tient dans la présence et le suivi d’un accompagnateur, nommé chez CSP Docendi « l’afestoyeur ». Un intitulé qui matérialise la différence entre accompagnateur AFEST et tuteur [3], ainsi que son caractère dynamique ! Garant du pilotage de l’AFEST et de l’évaluation de l’apprenant durant son parcours, l’afestoyeur va notamment favoriser la réflexivité de la démarche [4]. Interroger ce qui s’est passé à l’issue d’une situation apprenante est en effet déterminant – ce qui a fonctionné, ce qui reste à améliorer. Si le collaborateur va parfois procéder à cette analyse seul, l’afestoyeur va également donner du feedback, soit par rapport à ce que l’apprenant retranscrit, soit directement – si l’accompagnateur était présent lors de la situation apprenante. Ainsi, le collaborateur commence à se créer son propre modèle. L’apprentissage prend toute sa dimension lors de ces phases réflexives. Une réflexivité qui peut même débuter en amont de l’AFEST, via une phase d’analyse de la (future) situation de travail et d’élaboration d’hypothèses d’action [5]. Par ailleurs, comme toute action de formation, l’AFEST doit être traçable. Les organismes de formation accompagnant des entreprises dans la mise en place d’AFEST doivent donc prévoir une organisation spécifique et être en mesure de donner des preuves de la réalisation effective des parcours engagés. >> Pour en savoir plus : téléchargez notre livre blanc AFEST, transmettre les savoirs dans l’entreprise apprenante !  

Une modalité de formation sans équivalent pour apprendre vite en faisant bien – tout en réajustant et en évaluant les acquis

L’AFEST repose sur plusieurs « principes » qui, associés, la différencient des autres dispositifs de formation. C’est le cas de l’auto-formation, en situation de travail et donc, en action. Comme l’indique Marc Dennery, co-fondateur et co-dirigeant de C-Campus, tout apprenant, dans une telle configuration, « va produire ou adapter lui-même les modèles opératifs, les structures de connaissances qui lui sont nécessaires pour s’en sortir ». Challengé par le contexte, le collaborateur engagé dans une AFEST mobilise toutes les ressources dont il dispose pour résoudre les problèmes qui lui font face. Il teste et affine également ses savoir-faire en vue d’agir de la manière la plus efficace possible, lorsque la situation qu’il expérimente se renouvellera. La possibilité d’auto-évaluation représente par ailleurs un atout. En effet, l’apprenant prend conscience de ses manques de façon immédiate. Sa motivation à y remédier s’avère donc supérieure. La présence et le suivi de l’afestoyeur permettent en parallèle de déclencher des micro-formations au fil du parcours d’AFEST, afin de réajuster en permanence les séquences d’apprentissage aux besoins. Il s’agit là d’une remise à niveau totalement individualisée, qui favorise une progression consolidée, et rapide. L’évaluation de la progression de l’apprenant s’imbrique d’ailleurs dans le parcours de formation lui-même. Les indicateurs figurant dans les situations qu’il rencontre, le niveau de maîtrise du collaborateur est connu précisément. Sachant que la notion de fréquence est aussi prise en compte ; réussir à conduire une réunion de manière très satisfaisante, une seule fois, ne signifie pas que la prochaine occurrence sera réussie. Une question reste néanmoins posée : la formation en situation de travail est-elle adaptée au développement de compétences soft skills ? Pour Yann Coirault, la réponse est oui. « Le fait de savoir mener un entretien managérial constitue en soi un geste, à l’instar des gestes métiers. » Les soft skills nécessitent certaines connaissances fondamentales (mécanismes cérébraux et psychologiques, schémas comportementaux) et s’appuient sur des bonnes pratiques pour les mobiliser au moment adéquat. « Il est donc possible de déterminer les indicateurs d’un bon entretien managérial ».  

Les conditions sine qua non d’une mise en œuvre efficace de l’afest dans votre entreprise

Il existe en effet des « incontournables ». Premier d’entre eux, le fait que la formation en situation de travail soit considérée comme un dispositif de formation à part entière. Le temps consacré aux situations emblématiques est un temps de formation. Durant ces périodes dédiées, les collaborateurs ne produisent pas ; ils se forment. Ce faisant, ils doivent bénéficier d’un droit à l’erreur. Dans cette perspective, il est capital d’impliquer le management. Selon Yann Coirault, « les managers ne peuvent jouer le rôle d’afestoyeurs, alors que c’est parfois le premier réflexe ». La confidentialité que requièrent l’expérimentation et la montée en compétences, s’accomode mal d’une relation de manager à managé. L’implication du management passe alors par l’organisation de réunions « points d’étape », mensuelles, pour informer les managers des actions réalisées par leurs collaborateurs, et de leur évolution. Autre nécessité, celles de former les afestoyeurs. C’est d’autant plus vrai dans le cadre d’AFEST dédiées aux soft skills. L’accompagnement à la formation portant sur la gestion du stress, par exemple, requiert des compétences relationnelles aiguisées de la part des afestoyeurs. Et leur propre formation se fait alors… en AFEST, principalement ! « C’est le principe des poupées russes, indique Yann Coirault. » Il existe d’ailleurs un référentiel officiel, de compétences, dédié à l’accompagnement AFEST. Si les conditions évoquées ci-dessus concourent à la réussite de l’AFEST, elles ne suffisent pas à garantir une mise en œuvre réussie. Le manque de disponibilité des potentiels accompagnateurs représente un gros écueil. Or, bien que le temps à consacrer s’avère incompressible, la montée en compétences des afestoyeurs (dont témoignent toutes les personnes ayant assumé ce rôle) constitue in fine un gain non négligeable. En toute hypothèse, il revient aux organisations de déterminer elles-mêmes les bénéfices-risques d’une telle politique. Sachant que l’AFEST s’inscrit dans une perspective d’organisation apprenante.   L’AFEST apparaît comme un dispositif de formation extrêmement valorisant, pour les apprenants comme les afestoyeurs. Tous « se découvrent », ou redécouvrent des facettes clés de leurs compétences et métiers. Professionnalisation, mobilité, s’en trouvent favorisées. Et tout ceci nourrit la marque employeur de l’entreprise concernée, renforçant ses capacités d’adaptation voire de résilience, si besoin. Alors, êtes-vous prêts à vous lancer ?   [1] AFEST : Action de Formation En Situation de Travail. [2] Référent pédagogique, consultant, formateur et praticien MBTI chez CSP Docendi. Yann Coirault est passionné d’innovation pédagogique ou de contenus. Il est l’auteur d’Auto coaching efficace (Editions de l’Homme, 2011), Les 5 clés pour prendre les bonnes décisions et Les 5 clés pour être créatif au quotidien (Dunod, 2015 et 2016). [3] Selon Marc Dennery, le tutorat est avant tout un processus d’apprentissage par l’imitation. Pour sa part, l’AFEST met en jeu la conceptualisation de l’action, ainsi que la prise de recul à son issue. La FEST se différencie également de la formation sur le tas car, dans la seconde, on « profite » de situations existantes pour former. Quant au mentorat, il reste plus global, centré sur les valeurs, le métier, le réseau dans l’entreprise. [4] L’afestoyeur s’appuie parfois sur des experts internes, pour l’une des situations apprenantes dont il ne maîtrise pas les ressorts. Quant au référent AFEST, il est garant de la méthodologie – temps dédié à l’AFEST, fiches de présence remplies, formation des afestoyeurs… [5] Source : Marc Dennery, blog de la formation en entreprise (C-Campus).

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